Le travail des enfants, une pire réalité sociale

ecapital
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Dans les centres urbains, ces petits enfants, condamnés à être portefaix pour survivre soulignent qu’ils n’ont pas d’autres choix : « Moi, je suis devenu orphelin de mère à l’âge six ans. J’étais l’aîné de la famille. Après mon père s’est remarié. Et j’avais à faire à une marâtre qui me maltraitait devant mon père ». Ce garçon sans espoir  de quitter cet état, continue à décrire son calvaire : « A l’âge de sept, alors que j’allais commencer l’école, mon père me quitte pour le maquis. Dès cette période, il n’est jamais retourné ».

Dès lors, poursuit-il, la vie est devenu insupportable avec des nuits passées sans manger, ou à la belle étoile en dehors du foyer familial,etc. « J’ai alors pris la décision de descendre à Bujumbura convaincu que la situation pouvait s’améliorer ».

Asman, est son surnom. Après cinq ans dans la ville de Bujumbura, il a été engagé comme domestique mais ça n’a pas duré parce que « je ne savais rien faire  et  la rue m’a récupérée ».  Avec mes amis, affirme-t-il avec un petit sourire, on se débrouille pour survivre.

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Dans les centres urbains, le travail des enfants survient notamment à des fins d’exploitation économique, d’exploitation sexuelle, de mauvais traitements physiques et psychologiques infligés aux enfants domestiques ainsi que de la « location » des enfants à des fins de mendicité. « Un enfant handicapé rapporte », confie un aide social.

C’est le milieu rural qui est très touché par le phénomène parce que c’est là que vivent la majorité des ménages pauvres et non instruits. Ce milieu utilisait 99,8% de tous les enfants en 1998 et 98,8% en 2002. Presque tous les enfants travaillent dès le bas âge. Ils sont employés principalement dans les activités agricoles (travaux de labour, de sarclage, de récolte, de gardiennage des champs, etc.) et dans l’élevage (le gardiennage du gros et du petit bétail, l’entretien des troupeaux, etc.).  Et dans les régions du Nord comme les provinces de Cibitoke, Kayanza, Muyinga et Kirundo, ils sont employés dans les sites d’extraction minière.

Selon une étude  de l’ISTEEBU (Institut de Statistiques et d’Études Économiques du Burundi, il y a dix ans,  sur un effectif de 1.736.164 enfants de 7 à 14 ans, 403.957 étaient sur le marché du travail, soit 23,3%.  Ces chiffres s’estimaient en 1998 respectivement à 1.542.628 et à 471.518, soit 30,6% qui étaient sur le marché du travail, précise la même étude.

La pauvreté, les difficultés du système éducatif,  les faiblesses d’une législation  protectrice, le manque d’acteurs sociaux,… expliquent  cette situation, selon Jacques Nshimirimana, de l’Association « Solidarité de la Jeunesse Chrétienne pour la paix et l’enfance » (SOJPAE).  En effet, explique-t-il, la législation burundaise du travail reste muette sur les secteurs informels et marginaux qui emploient beaucoup d’enfants. Il rappelle que la mentalité culturelle  burundaise motivant à mettre au monde beaucoup d’enfants et l’influence religieuse y sont aussi pour quelque chose. « Cela pousse à une explosion démographique et pour survivre, des familles font travailler leurs enfants ou voient en eux, une chance de survie. Les enfants constituent aussi une main d’œuvre gratuite et moins coûteuse », signale-t-il. Jacques Nshimirimana trouve que dans les milieux ruraux, des enfants sont obligés de travailler dès le bas âge pour aider leurs parents.

Cependant, le Burundi a déjà ratifié différents textes protégeant les enfants et doit appliquer les conventions pertinentes à savoir la 138 et la 182 relatives respectivement à la fixation  de l’âge minimum d’admission à l’emploi et à l’abolition  des pires formes du travail des enfants.

Cette situation est une menace pour l’avenir du pays. Jacques Nshimirimana souligne que  beaucoup d’enfants sont emprisonnés, abandonnent les études  et le taux de scolarité  va decrescendo. Ces enfants n’ont pas l’occasion de bénéficier d’une éducation et par conséquent, ils constituent une bombe à retardement au moment où ils réaliseront qu’ils ont été exploités en violation de la loi.

Pour sortir de ce chaos, Jacques  Nshimirimana de la SOJPAE propose  qu’il y ait une sorte de loi régissant  le travail des enfants  car jusqu’à maintenant leur travail (commerce ambulant, pêche, travail des domestiques, bergers, etc) n’est pas reconnu par le code du travail.  « Les Burundais doivent couper court avec le comportement ignominieux d’exploiter les enfants car ils sont moins exigeants que les adultes ».

Il incite les journalistes  à contribuer  dans la sensibilisation contre le travail des enfants  et aussi informer le public  sur les risques du travail des enfants.