RFI détaille des informations autour des 49 soldats ivoiriens qui ont été retenus au Mali, l’ONU muette

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Paris (© 2023 Afriquinfos)-  Alors qu’officiellement ils ont été condamnés par la justice malienne pour, notamment, «complot contre le gouvernement» et «atteinte à la sûreté extérieure de l’État», les soldats ivoiriens auraient bien atterri à Bamako, dans le  cadre de la Minusma, à la demande du contingent allemand. C’est ce qu’indiquent des informations diffusées par RFI ce 17 janvier 2023.

Une version des faits qui concorde avec celle d’Abidjan qui stipulait que ses 49 militaires étaient des NSE (National Support Element), des éléments appuyant les casques bleus de la Minusma (communiqué du Conseil national de sécurité du 12 juillet 2022). Cette même version avait été soutenue par la Mission onusienne dès le 11 juillet, avant que celle-ci ne rebrousse chemin trois jours plus tard (déclaration d’un porte-parole du siège onusien à New-York diffusée sur RFI le 14 juillet).

Selon le média français, cette volte-face avait conduit à l’expulsion par Bamako du porte-parole de la Minusma moins d’une semaine plus tard, et ouvert un boulevard aux autorités de transition pour accuser les soldats ivoiriens d’être venus déstabiliser le Mali. Dans la foulée, les Nations unies ont appelé à la libération des 49 sans jamais préciser clairement leur statut réel. Selon plusieurs documents internes onusiens que RFI a pu se procurer, c’est pourtant bien la Minusma qui a fait venir les 49 militaires ivoiriens, et plus précisément le contingent allemand de la mission onusienne.

Les vols qui avaient permis aux soldats ivoiriens d’effectuer leurs rotations le 10 juillet ont été soumis aux autorités maliennes comme devant servir au transport de troupes du contingent allemand. Depuis juillet 2019, date de la signature d’une convention entre Abidjan et les Nations unies (un MOU, Memorandum of Understanding), sept contingents ivoiriens s’étaient succédé à Bamako et étaient considérés comme des NSE.

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Les 49 soldats arrêtés constituaient la huitième relève. Or, selon les documents consultés par RFI, c’est le contingent allemand de la Minusma stationné à l’aéroport de Bamako qui a fait les demandes de cartes d’identification de ces soldats ivoiriens. Dans certains cas, des noms allemands et ivoiriens apparaissent même sur la même liste. Et c’est à la demande du contingent allemand que les prédécesseurs des 49 avaient été décorés, par le commandant de la force onusienne lui-même, le 10 juin dernier, un mois tout juste avant l’arrivée des 49 qui devaient leur succéder.

Dès le début de l’affaire, la Côte d’Ivoire avait mentionné un contrat liant son armée à la compagnie privée SAS (Sahel Aviation Service) qui avait alors précisé être «mobilisée» sur le cas des soldats ivoiriens, sans donner davantage de précision. Le contrat portait, selon Abidjan, sur la sécurité et la logistique d’un site à l’aéroport de Bamako. De source onusienne, ce site abrite les NSE du contingent allemand et n’est pas géré par la Minusma elle-même.

L’Allemagne et les Nations Unies se murent dans un silence

En juin 2022, le contingent allemand déclarait auprès de la Minusma que 471 soldats soutenaient ses activités avec le statut NSE, sans préciser leur nationalité. Un chiffre pléthorique, largement supérieur aux 50 théoriquement autorisés par les règles onusiennes («Policy on NSE» de 2015), sauf raison exceptionnelle.

Comment l’Allemagne justifie-t-elle le recours à 471 NSE ? Des interrogations se posent donc selon RFI. Mais jusqu’ici, seule Abidjan a reconnu «des manquements et des incompréhensions» dans l’arrivée au Mali de ses 49 militaires, sans pour autant en préciser la nature.

Sollicitées par RFI, les Nations unies n’ont ni confirmé, ni démenti toutes ces informations. Dans sa réponse, le siège onusien à New York estime qu’«il ne serait pas approprié pour les Nations unies de transmettre des informations relatives à des sujets opérationnels et administratives (sic) internes ainsi qu’aux correspondances diplomatiques afférentes avec les autorités maliennes et les autorités des États membres qui ont fourni du personnel à la Minusma». Quant aux autorités allemandes – ambassade à Bamako et ministère de la Défense à Berlin –, elles n’ont pas donné suite.

Après six mois de détention, les 46 soldats ivoiriens ont été libérés le 7 janvier dernier, suite à une médiation menée par le Togo.

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