Les "Malawi Mouse Boys", marchands de brochettes de souris et révélation musicale

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<strong style="margin-right:4px;">© AFP/Archives Amos Gumulira.</strong>  					Des partisans de l'UDF chantent et dansent à Blantyre

Quand un jour, un automobiliste venu de loin s&#39;est arr&ecirc;t&eacute; et ce fut la r&eacute;v&eacute;lation.

Au volant de la voiture se trouvait le producteur am&eacute;ricain Ian Brennan, triple nomin&eacute; aux r&eacute;compenses de la musique am&eacute;ricaine Grammy Awards et incomparable d&eacute;nicheur de talents avec l&#39;album &quot;Tassili&quot; du groupe blues-rock touareg Tinariwen, r&eacute;compens&eacute; en 2012.

Brennan sillonnait le Malawi depuis d&eacute;j&agrave; deux semaines &agrave; la recherche de la perle rare et il avait parcouru plus de 2.000 kilom&egrave;tres quand il s&#39;est arr&ecirc;t&eacute; &agrave; Balaka, condens&eacute; de mis&egrave;re rurale dont les habitants, comme partout ailleurs dans ce pays tr&egrave;s pauvre d&#39;Afrique australe, raffolent de musique religieuse et de gospel.

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Occup&eacute; la journ&eacute;e &agrave; vendre ses brochettes, Alfred Gavanda avait sorti ses instruments, une guitare rudimentaire soud&eacute;e en m&eacute;tal de r&eacute;cup&eacute;ration et des percussions &agrave; la sonorit&eacute; non moins rustique.

&quot;Quand Alfred s&#39;est mis &agrave; chanter pour moi sur le bord de la route, avec les gamins du coin qui se sont joint &agrave; lui tous en choeur –c&#39;&eacute;tait le coucher du soleil– j&#39;ai v&eacute;cu un moment de musique parmi les plus beaux de toute ma vie&quot;, se souvient Ian Brennan.

&quot;Rares sont ceux qui peuvent produire de telles harmonies, propres aux voix qui ont appris &agrave; chanter ensemble depuis l&#39;enfance&quot;, ajoute-t-il.

Acclam&eacute;s &agrave; la sortie de leur premier disque en 2012 par la critique internationale qui n&#39;a rien trouv&eacute; &agrave; redire &agrave; leurs textes en chichewa aux th&egrave;mes r&eacute;p&eacute;titifs, louant invariablement Dieu ou J&eacute;sus, les &quot;Malawi Mouse Boys&quot; ont &eacute;t&eacute; compar&eacute;s aux guitaristes &eacute;vang&eacute;liques du grand sud am&eacute;ricain.&nbsp;

Au Malawi, leur notori&eacute;t&eacute; est loin d&#39;atteindre celle d&#39;un Code Sangala ou d&#39;un Peter Mawanga, stars nationales incontest&eacute;es. Mais, souligne Zondiwe, qui se pr&eacute;dit &agrave; lui-m&ecirc;me &quot;un avenir magnifique&quot;, &quot;nous, on a mis le Malawi, un pays pauvre, sur la carte du monde&quot;.

– Loin d&#39;&ecirc;tre milliardaires –

Huit au d&eacute;part, ils ne sont plus que quatre, &acirc;g&eacute;s de 22 &agrave; 30 ans, Alfred, Zondiwe et Nelson, copains d&#39;enfance, et Joseph Nekwankha, 42 ans, leur a&icirc;n&eacute; et le seul &agrave; parler anglais, les autres ayant d&ucirc; quitter l&#39;&eacute;cole pr&eacute;matur&eacute;ment.&nbsp;

Leur musique, qui fait &eacute;cho aux sonorit&eacute;s traditionnelles r&eacute;sonant le dimanche dans toutes les &eacute;glises du Malawi, est &quot;assez rare&quot;, estime Jack McBrams, un critique local. G&eacute;n&eacute;ralement, les villages du Malawi chantent pour se plaindre de leurs conditions de vie, pas pour glorifier le Seigneur.

&quot;Ils viennent d&#39;un village tr&egrave;s excentr&eacute; et n&#39;ont pas re&ccedil;u d&#39;autres influences que la leur. C&#39;est donc une musique qui vient de l&#39;int&eacute;rieur… Ils sont comme un vrai diamant brut&quot;, ajoute-t-il.

Apr&egrave;s le premier disque &quot;He is #1&quot;, produit dans un camion studio ambulant, et 75e des ventes sur le site d&#39;Amazon en 2012, un deuxi&egrave;me album est sorti d&eacute;but 2014.&nbsp;

Le d&eacute;but de la gloire et la vie d&#39;artistes n&#39;ont pas encore fait des &quot;Malawi Mouse Boys&quot; des milliardaires, loin de l&agrave;. Les recettes sont trop modestes, m&ecirc;me si Brennan assure qu&#39;elles sont &quot;significatives par rapport au revenu habituel local&quot;.&nbsp;

L&#39;an dernier, il est rest&eacute; tout juste assez pour acheter des semences et des engrais, et am&eacute;liorer l&#39;ordinaire agricole.&nbsp;

Il n&#39;est donc pas question pour l&#39;heure d&#39;arr&ecirc;ter la chasse aux souris, indispensable pour fabriquer les fameuses brochettes r&ocirc;ties, et gagner deux petits dollars par jour pour nourrir les familles.

Mais le groupe s&#39;autorise tous les espoirs depuis le concert donn&eacute; en juillet 2013 au Womad, un festival de musiques du monde pr&egrave;s de Bristol, au Royaume-Uni. Un voyage &agrave; l&#39;&eacute;tranger et pour la premi&egrave;re fois en avion, qu&#39;aucun n&#39;aurait os&eacute; entreprendre m&ecirc;me en r&ecirc;ve.&nbsp;

&quot;Ca a chang&eacute; ma vie&quot;, commente Alfred, le plus jeune, encore boulevers&eacute; de s&#39;&ecirc;tre produit devant des centaines de spectateurs europ&eacute;ens. &quot;Je crois qu&#39;un jour, nos vies vont changer, que nous serons capables de gagner de l&#39;argent, et d&#39;arr&ecirc;ter de vendre des souris pour devenir des musiciens pouvant vivre de la musique&quot;.&nbsp;