Le gouvernement met fin aux espoirs de réconciliation en Egypte en sanctionnant les Frères musulmans

ecapital
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Bien que certains experts minimisent l'effet de la récente décision du gouvernement, certains autres estiment qu'elle sonne le glas des espoirs d'un retour des Frères musulmans sur la scène politique égyptienne.

"Cela ne changera en rien la scène (politique, ndlr), car seule la loi peut trancher la question lorsque des individus sont accusés de terrorisme", a analysé Wahid Abdel-Maguid, spécialiste du Centre Ahram des études politiques et stratégiques. Il a ajouté que la décision prise par le gouvernement égyptien était purement administrative et qu'il était donc aisé de revenir dessus. "Il vaut mieux que le gouvernement élabore une nouvelle législation ou révise la législation actuelle afin de lui conférer la capacité de qualifier telle ou telle organisation de 'terroriste'", a estimé M. Abdel-Maguid.

Par ailleurs, les négociations en cours avec d'autres pays visant à les persuader d'inclure les Frères musulmans sur la liste des groupes terroristes ont besoin d'une base juridique plus solide, a-t-il ajouté.

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Les dirigeants des Frères musulmans ont décrit cette décision comme un camouflet anéantissant tous les espoirs de réconciliation et une nouvelle excuse pour réprimer davantage leurs membres. "Cette décision mettra fin à toute initiative pour mettre en œuvre la réconciliation nationale", a souligné Mohamed Toson, un chef de file des Frères musulmans, sur le site d'actualité semi-officiel Ahram.

M. Toson a également réfuté l'allégation du gouvernement selon laquelle le groupe est responsable de violences, indiquant qu'en prenant cette décision, le gouvernement a uniquement souhaité éliminer ses opposants politiques. Dans un communiqué rendu public mercredi, le gouvernement a fait savoir que la loi antiterroriste égyptienne serait renforcée contre quiconque continuant d'appartenir à ce groupe après cette annonce.

Le gouvernement a ordonné à la police et aux forces armées de protéger les installations publiques et les universités des actes terroristes du groupe, selon le communiqué. Le vice-Premier ministre égyptien Hossam Eissa a expliqué que le gouvernement avait pris cette décision dans le sillage de l'attentat meurtrier survenu à Mansoura, ville dans le delta du Nil (au nord du Caire), ainsi que d'autres actes de violence attribués à des membres des Frères musulmans. Les Frères musulmans ont toutefois condamné l'attentat à la bombe à Mansoura, qui a tué 16 personnes et blessé plus de 130 autres, dont la responsabilité a été revendiquée par Ansar Beit el-Maqdess, un mouvement jihadiste inspiré par Al-Qaïda.

Depuis la destitution du président islamiste Mohamed Morsi, les partisans des Frères musulmans ont organisé des manifestations, qui ont souvent dégénéré, et les étudiants membres du groupe ont essayé de perturber les cours dans diverses universités égyptiennes. Hany el-Gamal, directeur du Centre Kanana des recherches politiques et stratégiques, a fait savoir que la décision du gouvernement est intervenue à un moment opportun, notamment après l'attentat meurtrier à Mansoura.

"Si le gouvernement n'adopte pas une telle mesure, la feuille de route de transition sera entièrement touchée", a-t-il affirmé, ajoutant que cette décision a donné aux Egyptiens un soutien moral et permettra d'éliminer les craintes liées à la participation au prochain référendum constitutionnel programmé pour les 14 et 15 janvier. M. el-Gamal a prévu qu'il y aurait une confrontation sévère entre le gouvernement et les Frères musulmans dans les prochains jours, surtout après le gel des biens du groupe par le gouvernement.

Le gouvernement égyptien devrait contacter d'autres pays arabes ayant signé un traité antiterroriste avec l'Egypte pour leur faire connaître sa décision, a-t-il indiqué, ajoutant que l'Egypte devrait également demander au Conseil de sécurité de l'ONU de reconnaître les Frères musulmans comme un groupe terroriste.