Electricité : accès de la population à 30% en Afrique sur 130.000 MW de capacité installée

ecapital
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Interrogé par Xinhua à l'occasion des travaux de la 44e Assemblée générale de cette organisation ouverts pour trois jours lundi à Yaoundé, l'ingénieur ivoirien a dressé un tableau où les fossés sont énormes entre els différentes régions du continent pour la disponibilité de cette précieuse ressource, avec des taux de 6% d'accès dans certains pays.

Question : Quelle est aujourd'hui la capacité de production de l'électricité en Afrique?

Réponse : Je ne veux pas rentrer dans les détails des puissances installées par rapport aux puissances disponibles. Parce que dans la production de l'électricité les équipements ne sont pas tout le temps mobilisables à 100%. On peut dire que la capacité installée est aujourd'hui de 130.000 MW.

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Q : Quel en est le potentiel de production?

R : Nous allons aller source par source, puisque vous savez que l'Afrique est très nantie en matière hydraulique. On parle de plus de 100.000 MW. L'Afrique a des potentialités en géothermie. L’Afrique a des potentialités en charbon ; on sait faire du charbon propre. L'Afrique a des potentialités en gaz ; les pays d'Afrique du Nord produisent beaucoup en gaz. Et il y a les hydrocarbures. Aujourd'hui, on parle comment faire agir l'évolution des mines pour soutenir la production de l'électricité. La démarche à suivre est la mise en place rapide des unités pour supporter le déficit en pensant à l'introduction du renouvelable dont le plus renouvelable est l'hydraulique. La côte indienne et la côte méridionale sont nanties en vent : il y a des grands projets au Kenya et en Afrique du Nord. Et ne parlons pas du solaire. Mais attention ! On a l'habitude de dire qu'il y a beaucoup de solaire, mais pourquoi on a des problèmes ? La technologie de mise en valeur de l'énergie solaire est très chère et l'entrée des renouvelables est un peu lente, parce que ça demande encore plus financements que le fossile.

Q : D'après la note d'information que nous avons reçue, c'est 6% de la population africaine qui a accès à l'électricité. Comment expliquez-vous une telle situation?

R : Parlant de ces chiffres, il faut prendre les moyennes. Les taux les plus bas tourneraient autour de 6%, le taux le plus élevé est autour de 99%. Les pays de l'Afrique du Nord sont autour de 90 à 99%, pendant que pour les pays de l'Afrique subsaharienne, l’Afrique de l'Ouest tend vers 60 à 68%, l'Afrique centrale est autour de 25 à 30% -pendant que certains pays qui vont vers 40%, l’Afrique australe 70%, l'Afrique de l'Est autour de 40 à 45% pendant que certains pays sont autour de 25%. Donc, c'est la moyenne qu'on fait. La moyenne de l'Afrique tourne autour de 30%. Il y a des pays qui sont effectivement à 6%.

Q : Quels sont les défis pour le continent, par exemple la mobilisation des financements pour la construction des infrastructures dans ce secteur?

R : L'Afrique a un paradoxe, c'est que les ressources énergétiques sont importantes, elles sont inégalement réparties. D' où la mutualisation de ces ressources qui est de mettre sur place des équipements d'interconnexion entre les pays pour pouvoir profiter des sources les plus abordables pour plusieurs pays, mais aussi le fait que la mise en valeur de ces ressources demande beaucoup de fonds. Nous sommes dans un domaine où on ne parle qu’en milliards de dollars (américains). Donc, on ne peut pas, sans une bonne planification, sans un bon soutien financier des gouvernants et une bonne organisation des sociétés, venir à bout de la mise en valeur. Donc, c'est une organisation d'ensemble où chaque partie prenante joue son rôle. D'où on parle de régulation, on parle des sociétés qui sont dans la production, on parle de ceux qui font le transport et la décision. C'est une chaîne et là les décideurs sont interpellés pour jouer leur rôle, les sociétés sont interpellées pour jouer leur rôle.

Q : Selon une étude de la Banque mondiale, l'Afrique a besoin d’environ 93 milliards de dollars par an pour la construction des infrastructures. Quelle est la part des besoins en électricité dans ces investissements?

R : Pour assurer, à l'horizon 2030, 50% la moyenne de l’utilisation en Afrique, il va falloir injecter chaque année 10 milliards de dollars sur plus de 10 ans. Ça veut dire que c'est une constante chaîne d'investissement. Pourquoi ? Malgré la crise qui a frappé le monde, l'Afrique est restée autour de 5,5% de croissance en moyenne. Des pays font plus de 10%, des pays font 3%. L'Afrique a une démographie en croissance de 3%. Quand vous mettez ensemble la démographie qui fait l'objet de demande, la croissance économique qui fait l'objet de demande, par rapport aux progressions dans les sociétés, vous voyez des fois que l'effort est anéanti. Comme si la société n'avait pas progressé. Je suis venu au Cameroun pour une grande réunion en 2004 à Douala. De ce jour à aujourd'hui, peut-être que les Camerounais n'ont pas l’impression qu'on fait 40.000 à 60.000 raccordements par an. C'est comme si ce n'était pas vu, parce que celui qui n'a pas le courant, n'a pas encore vu. Ces efforts, il faut mettre en face la croissance démographique et la croissance économique. Donc, le challenge de l'Afrique, c'est celui-là.