Burkina Faso : Les députés hostiles à la tenue des législatives en 2020, mais favorables au maintien de la présidentielle

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Ouagadougou (© 2020 Afriquinfos)- Réuni à huis-clos, le parlement burkinabé a échangé le 06 juillet sur un rapport portant sur la situation sécuritaire en lien avec les élections couplées (législatives et présidentielle) du 22 novembre prochain. Les 127 députés de l’Assemblée nationale ont recommandé le report d’un an des élections législatives mais le maintien de la présidentielle.

«Nous avons demandé qu’en fonction de ce que nous avons dans la Constitution du Burkina Faso, que nous puissions pouvoir reporter les élections législatives et maintenir la présidentielle», a déclaré le président de l’assemblée nationale Allasane Balla Sakandé, à l’issue d’une audience avec le président Roch Marc Christian Kaboré.
Cette information largement partagée dans la presse et les réseaux sociaux fait polémique depuis mardi soir. Certains estiment que les parlementaires veulent prolonger leur mandat pour des intérêts personnels au nom de la détérioration de la situation sécuritaire.
Allasane Balla Sakandé, accompagné des six présidents de groupes
parlementaires, a présenté au chef de l’état un rapport d’une tournée,
courant juin, d’élus nationaux dans les cinq régions touchées par des
attaques djihadistes, pour «prendre le pouls de la situation
sécuritaire». «Dans certaines régions, des conseillers ont dû, pour
60km, faire des détours de 300km, quitter complètement le Burkina
Faso, aller dans un pays voisin, pour pouvoir revenir dans le
chef-lieu de la région. Pour certaines régions ou provinces, il est
quasi impossible d’y mettre les pieds», a-t-il expliqué. Le rapport
propose également l’obligation pour le président élu d’organiser la
réconciliation nationale avant d’organiser les élections législatives
et municipales, en 2021.«En maintenant l’élection présidentielle nous ne voulons pas tomber
dans un vide juridique, dans un terrorisme institutionnel également»,
a justifié Allasane Balla Sakandé. «Pour l’élection présidentielle, la
circonscription est nationale. Pour les législatives, la
circonscription est provinciale. Dans une province où il y a seulement
deux communes qui ont été enrôlées, quelle peut être la
représentativité d’un député élu par deux communes sur 26 ou 30?»,
s’est-il interrogé. «En partant à l’élection (…) des provinces ne
seront pas représentées à l’hémicycle, quelle légitimité aura cette
assemblée? Tenir les élections sans des provinces s’apparente à de
l’exclusion, qui est de ne pas permette à certaines populations de
certaines provinces d’avoir le droit des représentants à l’assemblée»,
a-t-il poursuivi.
«Les populations nous ont dit: on peut venir dans une province enrôler
par hélicoptère. Mais est-ce que les électeurs vont aller voter par
hélicoptère?» a-t-il ajouté. Le Burkina Faso est en proie à de
fréquentes attaques djihadistes, souvent entremêlées à des conflits
intercommunautaires.  Ces attaques ont fait plus de 1100 morts depuis
2015, et contraint près d’un million de personnes à fuir leurs foyers.
Selon l’ONU, les attaques djihadistes et les violences
intercommunautaires ont fait 4.000 morts en 2019 au Mali, au Niger et
au Burkina.

Polémique autour de la décision

Même si la plupart des Etats-majors des partis politiques ne se sont
pas encore prononcés, le porte-parole de l’Union pour le progrès et le
changement (UPC, opposition), Moussa Zerbo a indiqué mardi, dans les
colonnes du site d’information Burkina24 que son parti se démarque de
ce projet.
« Nous ne comprenons pas, nous n’allons pas cautionner. L’UPC se
démarque formellement de cette pratique et en aucun moment en interne,
l’UPC n’a décidé de découplage encore moins de report d’élection ou de
prolongation de mandat de député », a-t-il dit. Pourtant il ressort que
le rapport a été adopté par tous les députés.
« Même si le rapport a été adopté avec ce contenu, l’UPC ne peut pas
s’y reconnaître. Et si des députés (de l’UPC, ndlr) se reconnaissent
dans de tels engagements, ça n’engage qu’eux et eux seuls, mais pas
l’Union pour le progrès et le changement », a-t-il assuré, précisant
qu’une réunion est prévue sur cette question ainsi qu’une déclaration
publique du parti.
Le Burkina Faso est tombé dans un cycle d’attaques terroristes depuis
2015, faisant de nombreuses victimes et des milliers de déplacés. Les
opérations d’enrôlements pour le double scrutin présidentiel et
législatif se poursuivent dans plusieurs localités.

V.  A.

 

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